Trois appellations prestigieuses

English version below

Voici trois bouteilles de verre clair, portant un sceau indiquant le vin qu’elles contenaient : Pommard, Saint-Julien et Haut Sauterne (sic, aujourd’hui Sauternes).

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La bouteille de Pommard est de forme bourguignonne, de verre vert olive clair bullé et haut de 28,5 cm. La forme est assez irrégulière, asymétrique, avec un col torsadé. La bague de col est aplatie et irrégulière ; l’ouvrant est coupé et brut, non repris au feu. Le cul est lisse, repris par un pontil métallique, nu. Le sceau est marqué « Pommard », dans un ovale cerclé d’un liséré de point, avec deux motifs floraux au-dessus et en dessous du texte.

La bouteille de Haut Sauterne(s) est haute de 30.5 cm, légère et de forme bordelaise typique. Le verre est clair, vert tirant sur le jaune, avec une bague de col étroite et aplatie. L’ouvrant est brut, coupant, non douci au feu. Le cul est, comme pour la précédente, repris par un pontil métallique, nu. Le sceau est rond, cerclé d’un liséré de point et marqué « Haut Sauterne » (aujourd’hui orthographié Sauternes).

La troisième bouteille est une bouteille à Saint-Julien, de 29 cm de haut, légère et de forme assez proche de la frontignane, avec un fût de forme tronconique inverse. La marque du moule de fond est très visible, à 13,5 cm de la base. Le verre est vert olive clair. La bague de col est fine, aplatie et appliquée de manière zigzagante et redoublée. L’ouvrant semble avoir été rapidement douci au feu. Le cul est aussi repris par un pontil métallique, nu. Le sceau est rond et porte l’inscription « St Julien » surmontant le mot « Médoc », sous une treille de vigne.

Ces trois bouteilles datent très probablement, selon moi, de la 1ère moitié du 19ème siècle : formes et pontil nu « pré-boule », cette dernière apparaissant vers 1840-45. L’appellation « Haut Sauterne » (sic) figure sur le catalogue d’un négociant en vins dunkerquois à la fin de l’Empire dont je prépare la publication, mais elle a disparu du catalogue du marchand de vin Soupé (vers 1825), qui vend du « Sauternes », comme nous le connaissons aujourd’hui. Il est intéressant (et curieux) de constater que le verre des trois bouteilles est fort clair, alors que seul le Sauternes est aujourd’hui embouteillé dans des bouteilles claires.

 Three bottles for prestigious wines

Here are three clear glass bottles, each with a seal indicating their former content: Pommard (Bourgogne wine), Saint-Julien and Haut Sauterne (nowadays Sauternes; both Bordeaux wines).

The Pommard bottle is a typical Bourgogne bottle, some 28.5cm in height and blown in light olive green glass. The shape is irregular, asymmetrical, with a twisted neck. The string rim is flattened and irregular in shape. The mouth is simply cut and still sharp, unsmoothed. There is a bare metal pontil mark to the push-up. The seal is oval-shaped, surrounded with a dotted line, and reads “Pommard”, between two floral patterns, above and below the text.

The Haut Sauterne bottle is a 30.5cm tall typical and light-weighted Bordeaux cylinder. The bottle is made of yellowish green clear glass with a thin, flat, string rim. The mouth is, as with the previous one, sharp, and unsmoothed. There is a bare metal pontil mark to the push-up. The seal is round, surrounded with a dotted line and reads “Haut Sauterne”, presently spelled “Sauternes”.

The third bottle is a 29cm tall, light-weighted, Saint-Julien bottle. Its shape is close to the “frontignane” flowerpot (base of smaller diameter than the shoulder), with a clearly visible mould mark at 13.5cm from the base. The metal is light olive green in colour. The string rim is thin, flattened and curiously slaloming, redoubled. The mouth has been fire smoothed. There is again a bare metal pontil mark to the push-up. The seal is round, with a vine trellis above the words “St Julien” and “Médoc”.

These three bottles most probably date from the 1st half of the 19thC, as suggested by their shape and the bare pontil, which predates the glass “drop”, appearing in 1840-45. I have met the appellation “Haut Sauterne” (sic) in the 1814 catalogue of a wine merchant in Dunkerque (N. France) I’m currently publishing, but it disappears as such in the c. 1825 catalogue of the prestigious wine merchant Soupé in Paris, where the name “Sauternes” appears, as it is known today. It is altogether interesting and curious that these bottles are all blown in clear glass, while today the white wine Sauternes only is bottled and sold in clear bottles.

4 réponses à “Trois appellations prestigieuses”

  1. Avatar de Serge ADAM
    Serge ADAM

    Très très belles bouteilles, j’avais déjà vu un bouteilles avec le sceau Pommard, mais n’avais jamais vu les autres sceaux.
    Je ne suis pas trop étonné de la couleur clair des bouteilles, j’avais relevé pour la verrerie de Saint Léger des Vignes un tableau des fabrications de bouteilles datant de janvier 1856 et dans ce dernier il y avait des bouteilles bourguignottes et des Bordelaises en verre clair, et aussi des bouteilles de Champagne de cette couleur, les quantités n’étaient pas très importantes pour le mois 4366 Bourguignottes, 4576 Bordelaises et 2097 Champagnes, mais des clients demandaient des bouteilles de cette teinte, pour comparer avec les autres bouteilles en verre ordinaire pour le même mois il était fabriqué 16465 Bourguignottes, 379 bordelaises, et 7347 Champagnes pour le Four
    N°1 et fallait rajouter pour le Four N°2 4828 Bourguignottes, aucune bordelaise, et 28982 Champagnes en verre ordinaire aucune en verre clair pour ce Four, pour le Four N°3 aucune Bourguignotte, 2000 Bordelaises et aucune Champagne toujours en verre ordinaire et aucune en verre clair.

    1. Avatar de Thierry De Putter

      Merci Serge, comme toujours avec toi, des tas de données intéressantes: c’est toi qui devrais tenir ce blog 😉 … Les champenoises commandées aux verreries du Nord par les maisons de Champagne répondaient à un cahier de charge extrêmement strict et sont toujours de verre sombre. En revanche, Stéphane Palaude (le spécialiste incontesté des verreries de l’Avesnois) me dit qu’il devait forcément y avoir une production « hors normes » ou de second (ou troisième choix) et qui répondait à une demande des particuliers, notamment sur Paris (c’est bien la 1ère fois qu’on écoule du 2ème choix à Paris!). Peut-être les nivernaises répondaient-elles aussi à ces demandes spécifiques des particuliers, à Paris ou ailleurs … N’empêche, il est curieux – aujourd’hui – d’imaginer du rouge de bonne qualité (comme du St Julien) dans des bouteilles claires et aussi extrêmement légères … la St Julien pèse un petit 500 grammes, la moitié d’une champenoise avesnoise!

      1. Avatar de Serge ADAM
        Serge ADAM

        Non Thierry c’est toi qui a beaucoup de talent pour ton blog et c’est avec plaisir et intérêt que je te lis.
        J’ai trouvé aussi pour la même verrerie de Saint Léger des Vignes un inventaire des magasins de bouteilles daté du 31 décembre 1865 il y a a été trouvé 5822 bouteilles bourguignottes verre clair 1er choix 8366 Bourguignottes verre clair 2ème choix, 8663 Bordelaises verre clair 1er choix, 3489 Bordelaise verre clair 2ème choix, 1413 1/2 Bordelaises verre clair 1er choix, 1253 1/2 Bordelaises verre clair 2ème choix, 141418 Bourguignottes verre ordinaire 1er choix, 22398 Bourguignottes verre ordinaire 2ème choix, 8527 Bordelaises verre ordinaire 1er choix, 2509 Bordelaises verre ordinaire 2ème choix, 1413 1/2 Bordelaises verre ordinaire 1er choix, 258 1/2 Bordelaises verre ordinaire 2ème choix, plus aucun bouteilles de Champagne en verre clair ces dernières sont répertoriés Champagnes vraies dont 77140 Champagnes vraies 1er et 2ème choix, 1234 1/2 Champagnes vraies 2ème choix et 30059 1/4 Champagnes vraies 1er et 2ème choix

  2. Avatar de Thierry De Putter

    Donner aux visiteurs du blog le plaisir que j’éprouve moi-même est le but de la manœuvre! Talent, je ne sais pas … disons enthousiasme 🙂

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