Au 18ème siècle, la Belgique n’a pas d’existence politique autonome. Elle est partagée en deux grandes zones d’influence : les Pays-Bas autrichiens et les possessions du Saint-Empire romain germanique (voir carte). Charleroi, quant à elle, ne sera rendue par la France aux Pays-Bas autrichiens qu’en 1748 (traité d’Aix-la-Chapelle).
La production de bouteilles « belges » se concentre en Flandre (Bruges et Gand) et à proximité des bassins houillers wallons, dans les régions de Mons-Charleroi et de Liège (voir carte). La production atteignait environ 1.500.000 bouteilles par an dans les années 1760 – beaucoup trop pour le marché local. L’exportation était donc une condition de viabilité pour les verreries à bouteilles.
Jusqu’en 1748, Charleroi, française, exportait naturellement vers le reste de la France. Sa restitution aux Autrichiens va rendre ces exportations plus difficiles. Pour contourner cette difficulté, certains verriers (par ex. Col[i]net) délaissent leurs fabriques flamandes et s’installent à Dunkerque, en territoire français (voir carte).
D’une manière générale, les verreries de Charleroi comme les verreries flamandes vont très activement rechercher la clientèle des Provinces-Unies (Pays-Bas), grandes exportatrices de biens divers, y compris des boissons embouteillées, vers les colonies – notamment atlantiques.
Les bouteilles belges, mais aussi anglaises et allemandes, affluent vers Amsterdam et Middelburg. Les verreries belges produisent alors à plein des bouteilles dites « de Hollande » parce que leur destination est hollandaise – mais il s’agit bien de bouteilles fabriquées sur le territoire de la Belgique autrichienne ! L’appellation, fréquente en Anglais, de « Dutch onion » (oignon hollandais) s’applique donc probablement à une proportion (très) importante de bouteilles soufflées en Belgique.
Voyons ce que la Belgique autrichienne a produit, sur son territoire, au 18ème siècle (voir photos) :
- Des quantités industrielles d’oignons, connus un peu abusivement sous le nom de « Dutch onions» ;
- Des bouteilles cylindriques, de forme globalement fort proche du mallet anglais et en tout cas nettement plus épaisses que les cylindres et frontignanes français ;
- Des bouteilles très spécifiques (et exportées), comme les flasques plates à eau de Spa ;
- Comme partout, de la verrerie claire de prestige « façon de Venise. »
Les caractères distinctifs des bouteilles à vins belges de la 2ème moitié du 18ème sont :
- un fût assez large, cylindrique, avec une base souvent tassée sur elle-même (bouteilles non soufflées en moule semi-enterré, comme en France) ;
- un épaulement plus « carré » qu’en France, semblable à l’épaulement typique anglais ;
- un verre nettement plus ambré que vert (France) ou noir (Angleterre) ;
- des bagues de col plus fines qu’en France, en anneau cylindrique saillant ;
- des marques à la piqûre presque toujours cylindriques, de type « disc pontil. »
La petite Belgique était au 18ème siècle le paradigme d’une puissance industrielle en devenir, exportatrice nette de verre d’usage et qui dépendait donc très largement de l’exportation pour sa survie et son développement. Les verreries belges surent tirer avantage de la première « mondialisation » du commerce que le siècle offrait. Cependant, à force d’adapter la production et la nomenclature pour satisfaire le client hollandais qui remplissait et exportait le produit, le caractère belge du produit s’est perdu pour le client ultime, qui achetait des bouteilles réputées hollandaises.
« Belgian » bottles in the 18thC
Belgium had no political autonomy as such in the 18thC. It was then subdivided in two main areas of influence: the Austrian Netherlands and the dominion of the Holy Roman Empire (see map). Charleroi was first French and then returned to the Austrian Netherlands in 1748 (terms of the Aachen treaty).
The production of “Belgian” bottles concentrates in Flanders (Bruges and Ghent) and in the vicinity of the coal pits in the Mons-Charleroi and Liège areas (see map). The production was rather massive, reaching about 1.5 million bottles a year in the 1760’s – by far too much for the local market. Export was thus needed to ensure the economic viability of bottle glassworks.
Until its return to the Austrian Netherlands in 1748, Charleroi exported easily towards the rest of France, but this became obviously more difficult after this date. To avoid the resulting export problems, some glassmakers (e.g. Col[i]net) forsake their Flemish plants and settled in Dunkerque, France (see map).
Generally speaking, the Charleroi and Flemish glassworks all actively strove to export their products to the United Provinces (Netherlands), the indisputable 18thC hub for Continental exports, including bottled spirits, towards the overseas colonies, among other in the Caribbean.
Belgian bottles, together with English and German ones, massively flowed to Amsterdam and Middelburg, in the Netherlands. The Belgian glassworks then produced so-called “Dutch” bottles because they were sold to the Netherlands, even though they were actually blown in the Austrian dominion. The well-known “Dutch onions” were thus, to a large extent, Belgian bottles.
Let’s have a look at the Belgian bottle types produced in the 18thC (see pics):
- Myriads of onion bottles that were abusively known as “Dutch” ones;
- Cylindrical bottles, quite similar in shape to the English mallets and thus thicker than the French cylinders or frontignanes;
- Special bottles, as the ovoid-shaped flasks for the mineral water of Spa, that was even exported (in its specific bottle) as a luxury table water;
- As in many other places in Europe, some prestige clear glass in the “façon de Venise” (Venetian taste).
Here are some diagnostic features of Belgian bottles in the 2nd half of the 18thC:
- thick, cylindrical body with a saggy base (these bottles were not blown in semi-buried molds, as in France);
- square shoulders, closer to the English than to the French ones;
- amber-coloured glass, while French glass was usually greener and English almost black;
- fine salient ring-shaped string rims, thinner than in France;
- Cylindrical disc pontil scars (no sand pontil, as in England).
Belgium in the 18thC was a fine example of a small emerging industrial power that was a net exporter of utility glassware and thus strongly depended on the foreign markets for its survival and development. Belgian glassworks took full advantage of the export potentialities the century offered, thanks to a progressive trade globalization. However, the overseas customers soon forgot that most “Dutch” bottles were actually made in Belgium and only filled in – and shipped from the Netherlands.
Laisser un commentaire